- 31 janvier 2019
- Focus conseil
Logement vacant : rappel des conditions à respecter pour déduire les charges des revenus fonciers (CAA Marseille 07/11/2018)
Il appartient au propriétaire de prouver l’intention de louer et les démarches effectuées.
1. Ce qu’il faut retenir
Lorsqu’un logement est vacant, les charges foncières sont déductibles des revenus fonciers si le propriétaire apporte la preuve qu’il a l’intention réelle de louer le bien et qu’il a accompli des diligences en ce sens.
A défaut d’une telle démonstration, le contribuable sera considéré comme s’étant réservé la jouissance du logement. Aucune déduction des revenus fonciers ne pourra alors être pratiquée. CAA Marseille du 7 nov 2018, n°17MA03659
CGI Art.15
2. Conséquences pratiques – Avis Fidroit
Dans
le cas où le logement vacant est destiné à la location, le contribuable
devra se ménager la preuve des diligences effectuées pour louer le
bien. En pratique, il conviendra de conserver tout document permettant
d’établir les démarches et ainsi éviter une remise en cause de la
déduction des charges.
Il appartiendra au juge d’apprécier que le contribuable a effectué ces diligences.
On pourra démontrer une volonté de mise en location avec :
- Des publications d’annonces sur des sites internet,
- Un mandat de location signé avec une agence immobilière,
- Des échanges de mails entre le propriétaire et les potentiels locataires,
- Des dossiers de potentiels locataires,
- Des attestations de visites corroborées,
- Des témoignages,
- Etc.
Dans l’affaire sur laquelle s’est prononcée la Cour administrative d’appel de Marseille, le contribuable n’a pas pu prouver son intention de louer. Seules trois attestations de personnes qui déclarent avoir visité l’appartement ont été fournies, sans précision quant à la date exacte. Ces dernières, rédigées dans le cadre de l’instance, n’ont été ni précisées, ni accompagnées par des éléments complémentaires.
Avis Fidroit :
La décision de la Cour administrative d’appel de Marseille illustre le principe applicable en matière de revenus fonciers. La problématique est d’autant plus marquée que la charge de la preuve appartient ici au contribuable (contrairement aux situations généralement admises en droit fiscal).
Les propriétaires de logements destinés à être loués en revenus fonciers
qui souhaitent déduire des charges en l’absence de revenu doivent donc,
en amont, conserver des preuves de leurs démarches, même en l’absence de toute procédure de rectification.
Ces éléments de preuve seront également indispensables :
- Si l’immeuble fait l’objet d’un engagement de location dans le cadre d’un dispositif fiscal. Il est, en effet, possible de conserver le bénéfice de l’avantage fiscal en cas de vacance prolongée, mais à la condition de prouver les diligences effectuées (BOI-IR-RICI-360-60 § 180 notamment).
- Si le propriétaire a imputé un déficit sur son revenu global au titre des trois années précédant la période de vacance (BOI-RFPI-BASE-30-20 § 240). A défaut, l’imputation pourra être remise en cause.
L’analyse ne peut pas être stricto sensu transposée au cas
des revenus de la location meublée. En effet, en matière de BIC, le
logement dont le propriétaire se réserve la jouissance ne bénéficie pas
de la même exonération… La preuve de l’affectation réelle du bien pourra
néanmoins être utile pour déterminer le régime fiscal applicable.
Pour plus de précision, voir location meublée (professionnelle et non professionnelle).
3. Pour aller plus loin
3.1. Contexte
Un contribuable est considéré comme se réservant la jouissance d’un bien dans plusieurs situations :
- Lui ou un membre de son foyer fiscal occupe le logement (résidence principale ou secondaire) ;
- Il met gratuitement le bien à disposition d’un tiers sans y être tenu par un contrat de location ;
- Il laisse le logement vacant.
Dans ces situations, il est n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu
et ne peut donc déduire aucune charge afférente au logement.
BOI-RFPI-CHAMP-20-20 § 50
Par exception, dans le cas où le logement vacant, le propriétaire ne
sera pas considéré comme s’en réservant la jouissance s’il est en mesure
d’établir que celui-ci est destiné à la location. En d’autres termes,
les charges foncières seront déductibles des revenus fonciers si le
propriétaire apporte la preuve qu’il a effectué toutes les diligences
nécessaires pour louer le bien et démontre son intention réelle de le
louer.CE, arrêt du 13 février 1974, n° 86174
BOI-RFPI-CHAMP-20-20 § 70
3.2. Faits et procédures
Monsieur
et Madame B sont propriétaires d’un logement. Ils décident
d’entreprendre des travaux de réparation, d’entretien et d’amélioration
dans ce logement. Le bien n’est pas loué pendant et après la période des
travaux. Les charges sont déduites des revenus fonciers de Monsieur et
Madame B.
Suite à un contrôle fiscal, l’administration a remis en cause la
déduction des charges foncières des contribuables au motif que ces
derniers se sont réservé la jouissance du bien.
Monsieur et Madame B contestent les cotisations supplémentaires d’impôt
sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été
assujettis. Ils soutiennent que les travaux sont déductibles
puisqu’ils ont effectué toutes les diligences nécessaires en vue de
louer. Ils produisent trois attestations de visite du logement.
Le tribunal administratif de Montpellier rejette la demande des époux,
ces derniers interjettent appel devant la Cour administrative d’appel de
Marseille.
3.3. Arrêt
La
Cour administrative d’appel de Marseille rejette la requête de Monsieur
et Madame B. Elle considère que les époux se sont bel et bien réservé
la jouissance du bien.
« Les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve
la jouissance ne peuvent venir en déduction pour la détermination du
revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l’impôt sur le
revenu »
Il appartient au propriétaire qui entend, pour déduire les charges
afférentes à un logement resté vacant, se prévaloir de ce qu’il a
entendu le louer et non s’en réserver la jouissance d’apporter la preuve
des diligences qu’il a accomplies pour la location de ce logement.
3.4. Analyse
L’arrêt
de la CAA de Marseille illustre une situation où les contribuables ont
déduit de leurs revenus fonciers des charges foncières alors qu’ils ne
pouvaient justifier de leur volonté réelle de louer le bien.
Par conséquent, ils sont considérés comme s’étant réservé la jouissance
du bien, et à ce titre ils ne peuvent déduire aucune charge relative au
bien.
Une condition est essentielle pour déduire les charges en matière de
revenus fonciers : une mise en location effective. En effet, pour qu’une
charge puisse être déductible au regard des revenus fonciers, celle-ci
doit être engagée pour l’acquisition ou la conservation d’un revenu
foncier.
Exemple :
Un propriétaire qui reprend possession d’un appartement après le
départ de ses locataires en vue de l’occuper doit être regardé comme
s’en réservant la jouissance.
Étant exonéré en application du II de l’article 15 du code général des
impôts (CGI), il ne peut donc déduire de son revenu global ou d’autres
revenus fonciers imposables le montant des travaux de remise en état,
même si ceux-ci sont consécutifs aux détériorations du locataire
BOI-RFPI-BASE-20-30-30
Ceci étant, les dépenses (travaux, intérêts d’emprunt) effectuées
lorsque le bien n’est pas encore loué sont déductibles l’année du
paiement, puisqu’elles sont engagées dans le but d’acquérir un revenu.
Il conviendra de manifester auprès de l’administration fiscale
l’intention d’utiliser le bien pour se procurer des revenus fonciers en
louant le bien. Cette intention devra être confirmée par une mise en
location effective après réalisation des travaux.BOI-RFPI-BASE-20-80 § 280
Source : Fidroit