- 31 janvier 2019
- Focus conseil
Lorsqu’une avance sur assurance-vie a financé l’acquisition d’un immeuble locatif (ou des travaux), ses intérêts sont déductibles des revenus fonciers (RM 18/12/2018 et 20/12/2018)
Deux réponses ministérielles confirment la déductibilité potentielle des intérêts de l’avance sur assurance-vie ou contrat de capitalisation.
1. Ce qu’il faut retenir
Lorsqu’une avance est réalisée pour la conservation, l’acquisition, la construction, la réparation ou l’amélioration d’un bien donné en location nue, ses intérêts sont déductibles des revenus fonciers du souscripteur. Cette déduction n’est possible qu’au jour du paiement effectif de ces intérêts.
Par extension, cette avance (dette contractée auprès d’une compagnie d’assurance) devrait aussi être déductible pour l’IFI, selon les règles et conditions des prêts « in fine« .
RM Delpon, JOAN 18 déc. 2018, n°11053
RM Malhuret, JO Sénat 20 déc. 2018, n°02170
2. Conséquences pratiques – Avis Fidroit
Pour que la déduction soit envisageable, le contribuable doit justifier du lien direct entre l’avance et l’actif ou les travaux immobiliers et du paiement des intérêts au cours de l’année d’imposition.
En principe, sur une avance, aucun intérêt n’est payé annuellement ; ils
ne sont réglés qu’au jour de son remboursement (total ou partiel). Les
intérêts ne sont donc pas déductibles année par année, pendant la
période où ils se capitalisent. Seul leur paiement réel génère la
déductibilité.
Il est fondamental de pouvoir justifier l’affectation des capitaux
avancés par la compagnie d’assurance. Une simple déclaration apparait
insuffisante ; il convient de conserver la trace des flux pour démonter, si nécessaire, leur emploi.
Pour cela, on peut envisager un versement direct à l’étude notariale en
charge de l’acquisition, ou l’encaissement de l’avance sur un compte
ouvert spécialement pour payer les factures de travaux.
Avis Fidroit :
Le contribuable qui a déjà payé des intérêts afférents à une avance ayant financé la conservation, l’acquisition, la construction, la réparation ou l’amélioration d’immeubles locatifs peut faire une réclamation auprès de l’administration fiscale. Cette réclamation est possible pour les seuls intérêts payés au cours d’années non prescrites (2016 /2017 /2018). BOI-CTX-PREA-10-30 §20 et §120
NB : par ricochet, une dette contractée pour l’acquisition ou la réalisation de travaux sur un actif immobilier est potentiellement déductible de l’IFI.
Remarque :
Cette solution est plus difficilement transposable en matière de location meublée en raison de l’obligation de tenir une comptabilité commerciale (pour l’imposition au régime réel). L’avance doit alors être inscrite au passif de l’entreprise individuelle.
3. Pour aller plus loin
3.1. Contexte
En
matière de revenus fonciers, le propriétaire peut déduire, sans
restriction de montant ou de durée, les intérêts des emprunts contractés
pour l’acquisition, la construction, la reconstruction, la réparation,
l’amélioration ou la conservation de ses immeubles détenus en direct.
BOI-RFPI-BASE-20-80, § 20 à 60
Les réponses ministérielles confirment que cette règle est applicable,
dans les mêmes conditions, aux avances sur contrat d’assurance-vie.
3.2. Qualification juridique de l’avance
L’avance permet au souscripteur de percevoir des liquidés sans diminuer la valeur de rachat du contrat, qui demeure en l’état.
BOI-RPPM-RCM-20-10-20-50, § 130
L’administration qualifie l’avance de prêt, mais elle reste un
prêt particulier en raison des droits du créancier : à défaut de
remboursement, la compagnie d’assurance ne peut recouvrer sa créance
qu’à hauteur de la provision mathématique.
BOI-RPPM-RCM-20-10-20-50 § 130
C. Assu. Art L132-21
L’avance est encadrée par des règles déontologiques de la fédération française de l’assurance (FFA), notamment :
- le montant de l’avance ne doit pas dépasser 80 % du montant de la provision mathématique pour les contrats en euros et 60 % pour les contrats en unités de compte.
- l’avance est consentie pour une durée qui ne peut excéder 3 années renouvelables par tacite reconduction.
- le montant du taux d’intérêt annuel auquel est consentie l’avance doit être clairement indiqué au souscripteur au moment de l’opération, et ce taux d’intérêt ne peut être nul.
Ces règles sont préconisées pour que les avances ne soient pas qualifiables de rachats partiels.
Recueil des engagements à caractère déontologique des entreprises d’assurances membres de la FFSA ou GEMA
Toutefois, ces règles ne sont qu’indicatives. Une compagnie d’assurance est tenue de délivrer une avance, si les conditions générales du contrat le prévoient, même si l’avance excède les limites « déontologiques ». (Cass.civ 2 du 4 oct 2018, n°17-25624). Dans tous les cas, l’avance est limitée à la valeur de rachat du contrat. (C. Ass. L. 132-21).
L’avance peut être remboursée à tout moment par le contractant. A défaut, elle est déduite par l’assureur des sommes qu’il verse au bénéficiaire au dénouement du contrat.
Les intérêts sont, en général, payés en même temps que le remboursement de l’avance.
3.3. Avance sur assurance-vie et IFI
L’avance qui a financé un bien immobilier (ou des travaux) est une dette immobilière. La question de sa déductibilité de l’IFI se pose.
principes des dettes déductibles à l’IFI
Sont déductibles de l’IFI, les dettes :
- contractées par le redevable ou son foyer fiscal IFI,
- certaines et existantes au 1er janvier de l’année d’imposition,
- contractées en vue de l’acquisition, ou pour réaliser des travaux ou relatives aux impositions incombant normalement au propriétaire.
Des règles particulières sont prévues pour la déduction des prêts in
fine. Sur le capital restant dû, il convient d’appliquer un
amortissement « fictif ». Si le prêt in fine a un terme, le capital
restant dû est réduit d’un amortissement linéaire pour chaque année
entière écoulée (emprunt initial x nombre d’années écoulées depuis le
versement du prêt / nombre d’années total du prêt).
CGI art. 974, II,
BOI-PAT-IFI-20-40-20 §20
En pratique l’amortissement débute une fois la 1ère année écoulée,
calculé de date à date depuis le versement du prêt (et non par année
civile). Ainsi, la première année, la dette est normalement déductible à
100 % (BOI-PAT-IFI-20-40-20 § 20).
Remarque :
Les dettes qualifiées de « prêt à soi-même » ne sont pas déductibles.
Cette exclusion n’est pas applicable à l’avance, puisque la dette est
consentie par l’assureur.
CGI. art. 974, III, 1°
BOI-PAT-IFI-20-40-30 § 20 et 30
Enfin, pour la déduction d’une dette pour l’IFI, il faut tenir compte :
- du capital restant dû au 1er janvier de l’année ;
- des intérêts échus et non payés au 1er janvier ;
- des intérêts courus au 1er janvier.
Application à l’avance
Ces règles se combinent et s’appliquent à l’avance :
- le capital et les intérêts de l’avance sont déductibles de l’IFI
- l’avance est traitée comme un contrat de prêt à terme
Exemple : voir ici
Remarque :
Si l’avance est faite sur 3 ans puis prorogée une fois, il reste une incertitude sur la pratique de l’amortissement :
- soit l’amortissement n’est pratiqué que sur 3 années,
- soit au jour de la prorogation, il a lieu de corriger (pour l’avenir) les amortissements déjà réalisés pour amortir l’ensemble sur la nouvelle durée de l’avance (soit 6 ans).
Source : Fidroit